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Les exérèses chirurgicales
L'exérèse chirurgicale d'une lésion dermatologique est le prolongement de l'activité de dépistage et de diagnostic des lésions cutanées à risque de cancer. Sa réalisation par le dermatologue, expert de la chirurgie de la peau, assure au patient une prise en charge globale et cohérente.
Pourquoi une exérèse chirurgicale ?
L'exérèse chirurgicale consiste à découper (exciser) une partie plus ou moins large ou profonde de la peau pour en traiter une anomalie ou une excroissance. Elle est réalisée dans deux situations très différentes :
- En premier lieu, pour retirer une tumeur cancéreuse ou suspecte de l'être ; dans ce cas, c'est le traitement principal de la tumeur qui permet, par exemple pour les carcinomes de la peau, d'atteindre un taux de guérison définitive de l'ordre de 99%.
- La seconde situation dans laquelle on a recours à cette exérèse, c'est lorsqu'une anomalie bénigne de la peau est gênante, que ce soit pour des raisons fonctionnelles ou esthétiques. Lorsque l'exérèse est réalisée pour des raisons purement esthétiques, il est important de discuter avec le médecin des risques éventuels de cette exérèse, en particulier en ce qui concerne le résultat cicatriciel attendu.
Comment ça marche ?
Quand on opère une tumeur de la peau, l'objectif est de la retirer dans sa totalité. La taille de l'exérèse est donc plus large que la lésion visible elle-même, pour être sûr que l'intégralité du tissu tumoral a été retirée. En cas de tumeur maligne, il est nécessaire de retirer une zone saine autour de la tumeur (appelée marge de sécurité) dont la taille varie en fonction de la nature tumorale (de 4 millimètres pour un carcinome basocellulaire peu invasif, jusqu'à 2 centimètres pour un mélanome malin).
Le second élément qui va conditionner la taille de l'exérèse - et donc de la cicatrice - est une règle de chirurgie traditionnelle qui recommande que, pour éviter les cicatrices en relief, la longueur de la cicatrice soit au moins équivalente à 3 fois sa largeur. Cela signifie que, pour une perte de substance de 1 cm, la cicatrice sera d'à peu près 3 cm de long.
En effet, en règle générale, la forme de l'incision est circulaire, et le simple rapprochement des berges génère donc deux excès de tissus qu'il faut corriger par des excisions complémentaires de ce surplus cutané. Ceci permet de respecter la planimétrie, les reliefs et l'esthétique de la face puisque ces tumeurs sont le plus souvent situées au niveau du visage.
La localisation de l'intervention, même pour des tailles relativement modérées, de l'ordre de 1cm, ne permet pas toujours de suturer les berges directement par un simple rapprochement. L'angle de l'œil, la pointe ou une face latérale de nez en sont les exemples les plus parlants. On risque de déformer la zone et les orifices alentours (bouche, œil, narine) en ne faisant qu'un simple rapprochement. Le dermatologue doit donc dans ce cas, pratiquer des techniques de chirurgie plastique utilisant des lambeaux cutanés, en mobilisant de la peau provenant des réserves de laxité cutanée, principalement la joue. Par des jeux de glissement, d'avancement et de rotation, le dermatologue déplace de la peau sur une zone où il n'y en avait pas suffisamment pour compenser la perte de substance. Ces techniques de reconstruction, permettant de préserver le résultat esthétique, peuvent nécessiter autour de trois-quarts d'heure à une heure de temps opératoire avec des cicatrices qui seront de taille plus importantes.
Comment se passe l'exérèse ?
La première étape avant une exérèse chirurgicale est la consultation préalable qui permet au dermatologue de définir la nature de son intervention et de fournir toutes les explications nécessaires fixant ainsi ce que l'on appelle le contrat pré chirurgical. Cette démarche consiste pour le médecin à s'assurer que le patient a bien compris pourquoi l'on va retirer sa lésion et dans quelles conditions cela va se dérouler. C'est le moment où le dermatologue s'informe des traitements que prend régulièrement le patient et des raisons pour lesquelles il les reçoit.
Les traitements anticoagulants ne seront pas interrompus pour l'acte chirurgical, mais doivent être connus du dermatologue. Pour les traitements par AVK (médicaments anticoagulants qui agissent en bloquant la vitamine K), un dosage de contrôle de l' « INR » (permettant de mesurer l'efficacité de l'anticoagulation) est pratiqué la veille de l'intervention et doit être inférieur à 3,5. Les patients cardiaques doivent poursuivrent leur traitement à l'identique.
Cette première consultation a également l'intérêt de laisser un temps suffisant au patient -10 jours- pour comprendre parfaitement les explications reçues. Il pourra ainsi confirmer son rendez-vous opératoire en connaissance de cause. Le rendez-vous d'exérèse est préférentiellement proposé le matin. Chez les patients anxieux, il est possible que le médecin leur ait demandé de prendre un médicament à visée anxiolytique. Dans ces cas, le patient doit être accompagné, et surtout ne pas prendre sa voiture. En dehors de ces circonstances, le malade peut venir seul et reprendre son activité normale après l'exérèse.
Dans les faits, les conditions de dermatologie chirurgicale sont à peu près les mêmes que les soins d'un chirurgien dentiste. Dans un premier temps, le patient est installé et la peau est préparée. L'équipe soignante assure une asepsie locale par une désinfection large de la zone d'exérèse. L'intervention se déroule sous anesthésie locale et commence donc par l'injection dans la peau d'un produit anesthésique qui insensibilise la région concernée par l'exérèse. Le produit utilisé est, dans la grande majorité des cas, la xylocaïne adrénalinée. La xylocaïne supprime la douleur et l'adrénaline resserre les petits vaisseaux, ce qui diminue le saignement. C'est le dermatologue qui réalise lui-même l'anesthésie, juste avant son intervention chirurgicale. Il est donc le seul intervenant et le gestionnaire de la globalité de l'opération.
Cette anesthésie peut éventuellement être précédée d'une anesthésie préparatoire locale par une crème ou un patch anesthésique, appliquée deux heures avant l'intervention par le malade, ce qui permet d'anesthésier la peau pour éviter la douleur de la piqûre d'injection de l'anesthésique autour de la lésion.
Une fois la zone insensibilisée, le dermatologue peut débuter l'exérèse chirurgicale. Il utilise pour cela un bistouri et un appareil électrique permettant la coagulation des petits vaisseaux. Pour les exérèses simples, l'intervention se termine par la pose de points de suture qui sont mis en place en 1 ou 2 plans suivant la profondeur de l'intervention. Le fil utilisé se résorbe seul dans la peau pour ce qui est de la partie profonde. Celui utilisé pour la partie superficielle est un fil non résorbable qu'il faudra retirer en moyenne 8 à 15 jours plus tard en fonction des localisations de l'intervention.
Le médecin ou l'infirmière réalisent enfin un pansement avec une prescription de soins post-opératoires à faire. Le morceau de peau prélevé est envoyé dans un laboratoire spécialisé dit d'anatomo-pathologie dans lequel un examen microscopique va être réalisé. Ceci permettra de vérifier, outre la nature de la lésion, que l'exérèse a été suffisante et que les marges de résection sont bien situées en tissu sain.
L'approche et les techniques de la chirurgie dermatologique sont comparables à celles de la chirurgie esthétique. Chaque fois, le médecin recherche le meilleur résultat cicatriciel, par un bon positionnement des cicatrices dissimulées si possible dans les plis, par l'utilisation de fils superficiels très fins. Et quand cela est techniquement réalisable, en évitant les points apparents en surface et en réalisant ce qu'on appelle un surjet intradermique, c'est-à-dire des points profonds permettant d'éviter la pose du fil superficiel, soit en appliquant une suture adhésive par stéristip.
La technique du shaving : il s'agit d'une technique d'exérèse chirurgicale qui peut constituer une alternative à l'exérèse/suture traditionnelle. Elle consiste à enlever une petite lésion en créant un cratère en forme de cupule nécessaire à son exérèse et à favoriser ensuite, à partir du fond de la perte de substance la cicatrisation naturelle avec un bourgeonnement et un comblement aidé par l'application de crème cicatrisante prescrite par le dermatologue. Cette technique peut-être avantageuse dans des zones difficiles à réparer comme l'angle de l'œil. Elle permet parfois d'éviter des sutures d'exérèses trop longues pour les lésions bénignes situées dans des zones de grandes tensions musculaires. C'est le cas par exemple, pour un petit nævus en relief dans le dos.
Quand pratique t-on une exérèse ?
La principale indication des exérèses chirurgicales est le traitement des tumeurs cutanées malignes ou à fort potentiel de malignité. Quel que soit le type de cancers cutanés, une exérèse sera réalisée. Les principes appliqués seront différents suivant le type de cancer. La nature de l'intervention dépendra aussi de la taille de la tumeur, de sa localisation et des conséquences fonctionnelles et esthétiques éventuelles. Le principe de la chirurgie des tumeurs cutanées malignes est d'enlever une zone de tissu sain en plus de la tumeur dénommée « marge de sécurité ». Cette marge de résection, plus ou moins importante suivant le type de cancers pourra aller de 4 millimètres dans le cas de carcinomes à 2 centimètres en cas de mélanome.
Suivant la localisation et la taille de la tumeur, une première exérèse pourra ne pas suffire et il faudra intervenir à nouveau pour être sûr d'avoir retiré l'ensemble du tissu anormal en ayant respecté des zones de résection suffisantes. L'exérèse chirurgicale peut aussi être proposée pour retirer des anomalies cutanées bénignes pour des raisons esthétiques ou pour une gêne fonctionnelle.
Quels sont les résultats ?
En ce qui concerne les tumeurs malignes, l'exérèse est souvent le seul traitement de la tumeur permettant une guérison complète dans une très grande majorité de cas. Le médecin met en œuvre, durant cette exérèse tous les éléments pour que celle-ci s'accompagne des meilleurs résultats esthétiques possibles. Cette préoccupation permanente du médecin est parfois difficile à concilier avec la nature de la tumeur elle-même dont la taille et la localisation peuvent rendre l'exérèse et ses conséquences plus complexes. A cet élément s'ajoute le fait que le processus de cicatrisation est individuel. Certaines personnes cicatrisent très facilement et d'autres ont tendance à avoir des cicatrices anormales.
Quelles sont les complications ?
Les résultats d'une étude nationale organisée par les dermatologues français indiquent que le taux de complications à la suite d'exérèses chirurgicales est de l'ordre de 5%. Dans la très grande majorité des cas, les complications rapportées par cette étude ont été bénignes. Les complications bénignes les plus fréquentes sont les malaises vagaux au moment de l'intervention (qui se résout spontanément) et les saignements de la plaie opératoire dans les suites de l'intervention, notamment chez les personnes qui sont déjà sous traitements anti-coagulants. Comme dans toute chirurgie, il existe un risque d'infection post-opératoire, bénigne dans la majorité des cas.
Pour les interventions de lambeaux et de chirurgie, un suivi particulier est souvent organisé avec la reprise du pansement par le dermatologue en général dans les 3 à 4 premiers jours qui suivent l'intervention. Le patient part avec une ordonnance de soins pour réaliser des pansements. Ils peuvent être faits très simplement par quelqu'un de son entourage quand c'est une petite intervention, sinon, il recevra une prescription de soins infirmiers.
Souvent, il est nécessaire de revoir le médecin pour le retrait des fils superficiels. Ce dernier profitera souvent de ce rendez-vous pour communiquer les résultats de l'analyse anatomo-pathologique de la pièce opératoire. Le rendez-vous a lieu dans les 8 jours après l'intervention pour la chirurgie de la face, 10 à 15 jours pour la chirurgie du tronc et des membres et 15 à 21 jours pour la chirurgie des extrémités, en particulier du pied.
Lorsque le patient présente à la suite de l'intervention des manifestations inhabituelles telles qu'un gonflement avec une rougeur, un écoulement sanguin, une sensibilité anormale avec un début d'écoulement purulent, il est important qu'il reprenne contact avec le médecin ayant réalisé l'exérèse pour fixer avec lui la conduite à tenir.
Combien ça coûte ?
La chirurgie des tumeurs malignes ou à risque élevé de malignité est prise en charge par la Sécurité sociale suivant les règles conventionnelles. Les mutuelles pouvant prendre en charge tout ou partie des frais restant à la charge du malade. La tarification de l'exérèse est définie et cotée par le médecin dans le cadre de la classification des actes médicaux pris en charge par la Caisse nationale d'assurance-maladie.
Les exérèses réalisées à visée esthétique, sur demande du patient ne font pas l'objet d'une prise en charge par la Sécurité sociale.
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